« Le chofar est un cri, qui déjà en lui-même vient de loin mais qui, en outre, est porté par une longue transmission. (Donc, deux lointains, dans le son et dans le temps). C'est un cri que tout le peuple entend et doit entendre pour éprouver que l'être divin, par exemple le destin, est en train de se brancher sur la grâce plutôt que sur la rigueur. La vie est dure, rigoureuse, et le peuple juif a ménagé des moments privilégiés où il veut inscrire ce retournement où la vie, l'être divin vivant (élohim haïm) change de registre et devient généreux, accessible à la compassion, à la pitié. Et là, on rejoint le cri du bélier égorgé à la place d’Isaac.
D'où cette autre possibilité : le chofar serait la voix du silence ténue qui signale (déjà pour le prophète Élie) la présence divine ; c’est donc aussi la voix qui fait retentir en nous le silence initial, radical, au-delà de tout bavardage, le silence criant du rapport à l'être, qui est par essence originaire. Mais c'est plus complexe encore, car les sons du chofar sont de trois ordres (téqi’a, térou’a, shévarim, par ordre croissant de brisures dans la continuité), et qui plus est, les trois combinés selon des permutations rigoureuses, chargées, on s'en doute, de sens et de symboles précis, qui rendent cette voix de l'Autre infiniment parlante ».
Derniers ouvrages parus : « Islam, phobie, culpabilité » et « Fantasmes d'artistes », chez Odile Jacob.