’est une caricature. Un enfant porte une kipa. Sur sa tempe, un pistolet est braqué. Il est écrit « Les Juifs dehors ! ». C’est une autre caricature. Cette fois, un vieillard avec l’étoile jaune est accroupi devant une fosse. Un soldat allemand tire. On peut lire « Légalisez l’exécution des Juifs ! » C’est une troisième caricature. Un homme cogne la tête d’un Juif avec une batte de baseball, etc. A côté, les commentaires se multiplient. Ils en rient. Mais où sommes-nous donc ? Sur le réseau russe VK, l’équivalent de Facebook.
Des militants de l’ultra-droite française ou francophone utilisent VK pour ouvrir des comptes qu’ils alimentent de contenus antisémites, racistes ou homophobes. Ils sont fanatisés, endoctrinés. Certains réseaux sociaux dont VK me font penser à des fosses à purin. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que dans un courrier adressé au nouvel ambassadeur de Russie en France, Francis Kalifat, le président du Crif, prévenait que l’institution ne tolérera pas qu’en toute impunité, des néonazis utilisent ce réseau pour diffuser une propagande de haine et de mort. Malheureusement, certains pensent à tort qu’il ne faut plus craindre l’extrême-droite ou l’ultra-droite. Vraiment ?
Jean-Pierre B., comptait poignarder Emmanuel Macron à l'aide d'un couteau en céramique lors des cérémonies du 11 novembre 2018 prévues à Charleville-Mézières. Six personnes sont interpellées. En juin 2018, les services antiterroristes français interpellent dix personnes liées à l’ultra-droite. Les suspects avaient un projet de passage à l'acte violent aux contours mal définis, ciblant des personnes de confession musulmane. En novembre 2017, un mystérieux « Commando de défense du peuple et de la patrie française » déclare son admiration pour le néonazi Anders Behring Breivik, auteur de la tuerie de l’île d’Utoya (Norvège) qui avait coûté la vie à 77 personnes en 2011. Le groupe fait également part de son intention de passer à l’acte. En octobre 2017, un autre groupe d’ultra-droite projetait des « actions violentes » contre des politiques ou des mosquées. L'enquête a montré que l'organisation prévoyait des achats d'armes et d'effectuer des entraînements paramilitaires. Certains d'entre eux s'étaient déjà entraînés aux tirs.
« Un constat alarmant de la commission de défense puis d'enquête parlementaire sur les attentats du 13 novembre, en mai et juin 2016.»
L’ultra-droite est extrêmement dangereuse. « Les extrémismes montent partout et nous sommes, nous, services intérieurs, en train de déplacer des ressources pour nous intéresser à l'ultra-droite qui n'attend que la confrontation ». « Je pense qu'elle va avoir lieu. Encore un ou deux attentats et elle adviendra. Il nous appartient donc d'anticiper et de bloquer tous ces groupes qui voudraient, à un moment ou à un autre, déclencher des affrontements intercommunautaires », estimait Patrick Calvar, le patron de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), en dressant un constat alarmant devant les députés de la commission de défense puis d'enquête parlementaire sur les attentats du 13 novembre, en mai et juin 2016.
Quel rapport avec l’antisémitisme me direz-vous et mon propos initial ? Rappelons ce qui s’est passé aux USA. Robert Bowers, l’homme qui a assassiné onze personnes par balles samedi 27 octobre 2018, dans une synagogue à Pittsburgh (Pennsylvanie), se nourrissait lui aussi de cette littérature antisémite. Il avait posté de nombreux messages antisémites sur le réseau social Gab, ce clone de Twitter prisé de l’extrême droite anglophone. Ce réseau social, sur lequel il n’existe quasiment aucune modération, a attiré pourtant depuis 2016 toutes les grandes « stars » de l’extrême droite américaine. Exactement comme de nombreux réseaux, dont VK, qui attirent aujourd’hui… les grandes « stars » de l’ultra-droite antisémite francophone.