La haine des Juifs a la vie dure. L'Anti-Defamation League a publié les résultats de son enquête périodique, réalisée entre avril et juin de cette année, dans 18 pays auprès d'un échantillon représentatif de 9 000 adultes. Si les résultats enregistrés restent à peu près stables pour l'Europe de l'Ouest, les opinions antisémites progressent en revanche dans les pays de l'ancien bloc soviétique, en Argentine, au Brésil et en Afrique du Sud.
Comparé à 2015, l'antisémitisme a notamment augmenté de 14% en Ukraine, de 11% en Pologne, ou encore de 8% en Russie. Il a au contraire reculé en Italie de 11%, en Autriche de 8% et au Canada de 6%.
Les stéréotypes antisémites traditionnels trouvent toujours preneur. 72% des Ukrainiens, 71% des Hongrois, et plus de la moitié des Russes et des Polonais pensent que les Juifs contrôlent la finance mondiale. 70% des Brésiliens, 60% des Sud-Africains et même 25% des Canadiens croient que leurs compatriotes juifs sont d'abord loyaux à Israël.
Le rapport à la Shoah est l'un des points les plus problématiques. Le public interrogé est majoritairement persuadé que les Juifs parlent trop de la Shoah. Ils sont près de 40% d'Européens à être de cet avis, partagé par 42% des Allemands. La proportion bondit à 74% en Pologne, où la législation a d'ailleurs récemment limité la liberté d'expression et de recherche sur la responsabilité nationale au cours de la 2e Guerre mondiale.
L'enquête de l'ADL établit en outre que la proportion d'opinions antisémites dans les pays européens est en moyenne trois fois supérieure chez les Musulmans. Ce qui place pourtant leur niveau d'antisémitisme loin en dessous de ceux des pays arabo-musulmans où l'enquête avait été effectuée en 2014.
En France, l'ADL recense 17% d'adultes antisémites. Un chiffre stable depuis 2015, après un pic à 37% en 2014. Les Français interrogés sont encore 32% à penser que les Juifs sont plus loyaux à Israël qu'à la France et 31% à estimer qu'ils parlent trop de la Shoah. Ils sont aussi 29% à trouver qu'ils ont trop de pouvoir dans le monde des affaires et 21% dans les médias.
Seule vraie bonne nouvelle, le soutien au BDS reste extrêmement faible. Hormis en Afrique du Sud, où le boycott d'Israël est soutenu par 38% de la population, en Europe il ne dépasse pas la barre des 15%, avec une pointe à 18% pour la Belgique.
Les résultats du rapport publié le 21 novembre inquiètent le directeur général de l'ADL. « Il est préoccupant qu'environ un Européen sur quatre adhère encore aux croyances antisémites qui prévalaient avant la Shoah ». Pour Jonathan Greenblatt, « ces constats envoient un fort signal d'alarme. Il reste beaucoup à faire pour enseigner aux populations de nombreux pays à rejeter le fanatisme, et à traiter de façon urgente les conditions de sécurité, là où les incidents violents sont en hausse ».