Actualité Juive : Des craintes quant à l’approvisionnement en viande cachère sont apparues à l’approche des fêtes de pessah du fait que de nombreux Shohatim auraient été touchés par le Covid-19. Qu’en est-il aujourd’hui de la situation ?
Rabbin Bruno Fiszon : Il y a effective- ment eu quelques difficultés d’approvi- sionnement à ce moment-là mais au- jourd’hui la situation revient à la nor- male. On évalue à la moitié de l’ensem- ble des Shohatim français qui ont été at- teints par le virus, de manière sévère pour certains. Cela a provoqué une ten- sion, dans la région du Grand Est ainsi qu’en région parisienne, surtout en ma- tière d’approvisionnement en viande de veau, d’agneau et de mouton. Ces diffi- cultés étaient concomitantes avec l’aug- mentation de la demande en viande à cette période-là. Au même moment, et en raison de la fermeture des frontières, les Shohatim israéliens ont dû cesser leur exercice en France. La shehita à destination d’Israël est donc pour l’ins- tant totalement stoppée. Aujourd’hui, les abattoirs reprennent et à Paris comme en provinces, les consom- mateurs peuvent à nouveau trouver toute la viande qu’ils souhaitent dans les rayons. Il n’y a donc pas d’inquiétude pour l’approvisionnement en viande ca- chère. En outre, la crise liée au coronavi- rus a mis en stand-by toutes les polémi- ques autour de l’abattage rituel.
Actualité Juive : La crise actuelle risque-t- elle d’impacter à la hausse le prix de la viande cachère ?
R.B.F. : Je ne le pense pas étant donné que l’abattage revient quasiment à la normale. La plupart des shohatim ont re- pris leurs fonctions. Les principaux abat- toirs ont repris leurs activités, certains travaillant même davantage aujourd’hui pour compenser le manque qui pourrait être constaté ailleurs. Je pense notam- ment aux abattoirs bretons ou de Bour- gogne qui ont augmenté leur production de viande abattue rituellement.
Actualité Juive : Le gouvernement souhaite- rait parvenir à une autonomie de la France en matière alimentaire. Peut-on l’envisager pour la viande cachère ?
R.B.F. : C’est ce vers quoi il faudrait en ef- fet se rediriger. Il faut être aussi patriote dans la cacherout, faire travailler les abattoirs et les shohatim français et réduire les importations de viande venant d’ailleurs pour avoir notre part dans l’effort national en vue de soutenir notre production. Je rap- pellerais d’ailleurs que c’est déjà le cas de la plupart des consistoires français, et bien avant la crise liée au Covid, qui privilégient l’abattage national et la viande française. En ce qui concerne les bovins, je pense que nous disposons de suffisamment d’élevages en France et de Shohatim pour viser l’auto- suffisance. Les prix ne devraient pas telle- ment varier, mais ils ne seront pas les prix qu’ affiche la viande d’ importation, viande pas toujours de grande qualité et générale- ment congelée.
Actualité Juive : Y-a-t-il des règles sanitaires à recommander aujourd’hui dans la manipulation de la viande que l’on achète ?
R.B.F. : Les précautions sanitaires sont normalement déjà prises en amont par tous ceux qui sont amenés à manipuler la viande. Il s’agit de l’utilisation de gants et de masques notamment ainsi que de la dés- infection des lieux. Quant au risque d’une éventuelle transmission du Covid-19 par la viande et plus généralement par la nourri- ture, il n’est pas avéré. Le temps de survie du virus qui serait présent sur un morceau de viande, n’est pas long et la cuisson le détruit par la suite.
Je recommanderais donc, comme tous les autres produits que l’on ramène de l’extérieur chez soi, de les manipuler avec des gants et de les laisser reposer au frigo –ou au congélateur si l’on souhaite congeler la viande - deux à trois heures avant de les manipuler. Cela va au-delà des mesures sanitaires recommandées mais permet de réduire au minimum tout risque de contamination.